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Koter PsySérie d'articles exclusifs rédigés par une psychiatre pour votre site Koter Info
Sujets ciblés destinés à informer et à conseiller les étudiants de LLN ou WSL


Un petit verre ou une sacrée cuite ?

A Louvain-La-Neuve ou à Woluwé-Saint-Lambert, il est souvent question d'abus d'alcool en milieu estudiantin, surtout en période de baptêmes. L'alcool coule à flots dans les soirées estudiantines dont la fréquence engendre une consommation importante tout au long de l'année académique, situation qui a toujours existé. Le phénomène est-il en augmentation ou plus critique que par le passé ? Pour tenter d'apporter des réponses fiables et claires, l'UCL a diligenté 8 études en parallèle auprès de 7.000 étudiants volontaires interrogés par internet. Les réponses ont été analysées par une équipe dirigée par le professeur Vincent Lorant de l'Institut de recherche Santé et société de l'UCL.

Etat des lieux selon le Professeur Lorant : 60% des jeunes affirment avoir augmenté leur consommation d'alcool depuis leur entrée à l'université et 13% des étudiants déclarent consommer de l'alcool 4 fois par semaine ou plus. En moyenne, un étudiant boit 11 à 15 verres d'alcool par semaine. Supérieure aux recommandations de l'OMS, la surconsommation concerne 18% des filles et 31% des garçons, soit une moyenne de 23% des étudiants. Quant au fameux "binge drinking" à la mode, 42% des garçons et 18,5% des filles déclarent s'adonner de manière hebdomadaire à cette pratique (= 1 étudiant sur 4).
Evidemment, 60% des étudiants buvant de l'alcool en soulignent les effets positifs tels un renforcement social et un effet de relaxation après une journée ou une période stressante. Par contre, rares sont ceux qui soulèvent des conséquences négatives puisque plus de 80% n'en rapportent aucune. Cependant, en creusant un peu, ils savent que les effets délétères négatifs existent : 66% des étudiants avouent que leur consommation d'alcool les a déjà menés à brosser des cours et 37% affirment qu'elle les a rendus incapables d'étudier ou les a fait négliger leurs études ...

Question de rythme
Les études menées par le professeur Pierre Maurage (Institut de recherche en sciences psychologiques de l'UCL, IPSY) ont montré que l'impact cérébral d'une surconsommation de boissons alcoolisées varie en fonction de la manière dont l'alcool a été ingéré. Grâce à un enregistrement électro-encéphalographique par potentiels évoqués, il a prouvé que le binge drinking altère rapidement le fonctionnement cérébral, contrairement aux buveurs qui consomment la même quantité d'alcool de manière plus étalée dans le temps. L'alcool a donc un effet stérile indéniable sur les performances académiques des étudiants, surtout si sa consommation se pratique sous la forme de "biture express". Ces effets sont mis en évidence à court terme, mais il est probable qu'ils persistent à moyen et à long terme, ce qui doit encore être étudié, ajoute Martin de Duve, directeur de l'asbl Univers Santé.
Au-delà d'un étalage de chiffres, les études menées par l'UCL montrent aussi l'impact de certains facteurs collatéraux comme les liens sociaux. Les étudiants socialement proches tendent à partager des comportements similaires (influence observée entre pairs dans les facultés favorisant les liens sociaux, notamment par des travaux pratiques et des séances d'exercices en petits groupes). Ainsi, dans les facultés très masculines (comme celle des ingénieurs), les garçons et les filles sont de plus grands consommateurs que dans les facultés plus féminines (comme celle de psycho). Autre constat, les étudiants ont tendance à surestimer la consommation moyenne de leurs pairs (2 verres pour les garçons et 3 verres pour les filles) ce qui les incite à augmenter leur consommation personnelle pour coller à "la" norme (mal évaluée).

Jacques Brel le chantait si bien : Non Jeff, t'es pas tout seul ...
Didier Lambert, vice-recteur aux affaires étudiantes de l'UCL, soulignait que ces études ont aussi livré des constats concrets fondés sur le phénomène de socialisation. Le milieu dans lequel les étudiants vivent a un impact sur leur consommation d'alcool. On constate que les étudiants qui boivent le moins sont ceux qui vivent chez leurs parents, puis ceux qui vivent seuls ou collectivement en kot, et ensuite ceux qui fréquentent les cercles. L'enquête montre que les étudiants vivant chez leurs parents boivent quand même 1,7 verre d'alcool en moyenne par jour. D'autre part, contrairement à l'idée reçue, les pré-soirées n'ont pas pour vocation la soûlographie rapide entre potes à moindres frais, mais constituent des moments de convivialité qui ne se retrouvent pas dans les soirées à cause de leur atmosphère trop bruyante. Se pose alors la question de l'accessibilité à l'alcool ou de la démythification de son effet, c'est pourquoi tous les acteurs concernés à l'UCL tentent de limiter les risques en sensibilisant les étudiants aux effets négatifs de l'alcool sur leurs résultats d'études.

Former les fêtards selon Martin de Duve
La Charte Aune (Animation Universitaire étudiante) cadre les animations du campus universitaire. Convaincus de leur utilité, les comitards suivent un cycle de formation pour assurer que la fête se terminera au mieux, sans débordements et sans excès. Non obligatoires, mais fortement conseillés, des modules de sensibilisation et de responsabilisation s'adressent aux présidents de cercles, vice-présidents, trésoriers, responsables de bars et de baptêmes. Le but est de donner des balises, des moyens d'action, des conseils sur la manière de réagir en soirée, etc.



Notes de la psy
Souvenez-vous de cette reine des bleuettes du cercle de droit qui a fini sa soirée à l'hôpital pour cause de coma éthylique, fruit de l'élection du Roi des bleus (concours lors duquel les nouveaux étudiants s'affrontent en buvant le plus vite possible des quantités astronomiques de bières). À peine sacrée Reine, cette étudiante (20 ans) s'est évanouie avec une concentration de 3,14 grammes d'alcool par litre de sang après avoir ingurgité une soixantaine de bières (en se faisant vomir à intervalles réguliers). Désormais, l'élection du Roi des bleus se fait à la bière sans alcool.

Qu'est-ce que le binge drinking ?
Le binge drinking peut se traduire par "hyperalcoolisation", "intoxication alcoolique aiguë" ou encore en langage scientifique "alcoolisation paroxystique intermittente". Il s'agit d'un mode de consommation excessif de grandes quantités de boissons alcoolisées sur une courte période de temps, par épisodes ponctuels ou répétés. Le but consiste à atteindre le plus vite possible un état d'ébriété avancé. Pour le National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism des États-Unis, l'hyperalcoolisation est un modèle de consommation d'alcool avec une alcoolémie égale ou supérieure à 0,8 g d'alcool par litre de sang. Pour l'adulte commun, il correspond à la consommation d'au moins 5 verres standards (hommes) ou 4 verres standards (femmes), sur une durée de +/- 2 heures. Un verre standard correspond à 25 cl de bière = 12,5 cl de vin = 1 whisky-coca = 1 pastis, dans chaque cas, on absorbe environ 10 grammes d'alcool par verre standard.
Proportion réelle d'alcoolémie dans votre sang selon votre consommation en dehors des repas et selon votre poids :
Homme
      verres standards > 1 pour 60 kg = 0,30 ... pour 70 kg = 0,25 ... pour 80 kg = 0,20 ... pour 90 kg = 0,15
      verres standards > 2 pour 60 kg = 0,60 ... pour 70 kg = 0,50 ... pour 80 kg = 0,40 ... pour 90 kg = 0,35
      verres standards > 3 pour 60 kg = 0,90 ... pour 70 kg = 0,75 ... pour 80 kg = 0,70 ... pour 90 kg = 0,60
Femme
      verres standards > 1 pour 50 kg = 0,40 ... pour 60 kg = 0,35 ... pour 70 kg = 0,30 ... pour 80 kg = 0,20
      verres standards > 2 pour 50 kg = 0,80 ... pour 60 kg = 0,70 ... pour 70 kg = 0,60 ... pour 80 kg = 0,50
      verres standards > 3 pour 50 kg = 1,20 ... pour 60 kg = 1,10 ... pour 70 kg = 1,00 ... pour 80 kg = 0,85

Binge drinking, et puis ?
Ce mode de consommation excessive d'alcool est non seulement dangereux pour la santé, mais il faut aussi déplorer les conséquences de la conduite en état d'ivresse ou des comportements à risque, notamment sur le plan sexuel. De nombreuses études scientifiques ont démontré que le binge drinking peut également induire des effets néfastes sur le plan cognitif. Et c'est précisément ces séquelles au niveau de votre mémoire que vous avez trop tendance à sous-estimer.
N'oubliez pas que votre cerveau est en cours de maturation jusqu'à 20-25 ans. Dans ce précieux cerveau, vos neurones sont les premiers à trinquer (après vous) lors d'une administration majeure d'alcool suivie d'un sevrage brutal.
Votre hippocampe (zone cérébrale impliquée dans la mémoire) souffre aussi, or cette structure est très sensible aux lésions induites par l'alcool. Chez des rats adultes (excusez la comparaison), il a même été démontré que le binge drinking répété entraîne une réduction du volume de l'hippocampe ce qui explique en partie les troubles de la mémoire dont souffrent les personnes alcooliques. D'autres études ont montré que le binge drinking entraîne des difficultés d'attention, de réflexion, de planification, de prise de décision et des pulsions incontrôlées.

Morale glissée au creux de l'oreille
Ne titillez pas vos limites, ne buvez pas des quantités démesurées d'alcool en un temps record. Apprenez à maîtriser votre consommation d'alcool afin de profiter un maximum de la fête. Folklore estudiantin ne veut pas forcément dire beuverie !

Votre psy.


Notes de Koter Info
Vous seul avez le libre arbitre de gérer votre consommation d'alcool. Le fait de koter n'est pas une cause de surconsommation si vous n'abusez pas de la liberté acquise par l'éloignement familial. Dans votre intérêt, essayez de faire la fête de manière raisonnable par rapport à vos obligations d'étude et de manière attrayante par rapport à une soirée qui laisse de bons souvenirs. Honnêtement, est-ce agréable de terminer une soirée en vomissant aux toilettes et en mettant 48 heures pour récupérer ?
Votre comportement idéal reposera donc sur un minimum de maturité en évaluant clairement la motivation de votre présence en études supérieures, il s'agit de votre avenir et des finances de vos parents (sacrifiant un fameux budget afin que vous puissiez faire des études intéressantes). Que vous soyez à LLN ou WSL, bonne année académique à tous et bonne réussite, voilà ce que j'ai envie de vous souhaiter, alors ne gâchez pas bêtement vos possibilités.
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